Évaluation d’interventions non médicamenteuses à visée de réduction du stress sur la régulation autonome et les états mentaux de relaxation: Étude pilote chez la femme

15 Oct 2025
12:15
ADENAUER

Évaluation d’interventions non médicamenteuses à visée de réduction du stress sur la régulation autonome et les états mentaux de relaxation: Étude pilote chez la femme

Laure ZAGO, Université de Bordeaux

Contexte. Le stress chronique, une réponse prolongée à des situations de tension émotionnelle ou physique récurrentes, survient lorsque les individus ne disposent pas de temps pour récupérer entre les facteurs de stress. Ce phénomène se traduit dans la population générale par un état de vigilance accrue, une anxiété persistante et des préoccupations constantes, affectant une large part de la société. Bien que toutes les catégories de la population soient touchées, certaines, comme les femmes, sont particulièrement vulnérables. Sur le plan physiologique, le stress chronique entraîne notamment une sécrétion continue de cortisol et de noradrénaline, qui à long terme affecte la santé mentale et physique, provoquant des troubles émotionnels, anxieux, dépressif, et cognitifs, un affaiblissement du système immunitaire, et des maladies cardiovasculaires (Hassamal, 2023). Le stress chronique est également associé à des pathologies cérébro-vasculaires et neurodégénératives en raison de son impact neurotoxique, sur certaines structures cérébrales (Milligan Armstrong et al., 2021; Mosconi et al., 2024) (Knezevic et al., 2023). Ces multiples répercussions font du stress chronique un enjeu majeur de santé publique, avec des coûts indirects élevés pour la société en termes de dépenses de santé. La mise en place d’interventions non médicamenteuses pour réduire significativement ses effets apparaît cruciale, tant pour la prévention individuelle des maladies liées au stress et l’amélioration du bien-être psychologique, que pour alléger le système de santé et promouvoir une société plus résiliente.

Méthode. L’étude pilote a été conduite auprès de 20 femmes âgées de 20 à 30 ans, ayant un niveau d’anxiété de modéré à élevé (évalué par le GAD-7(Micoulaud-Franchi et al., 2016) ). Chaque participante a reçu deux types d’interventions, selon un plan croisé : un massage réalisé manuellement pendant 10 minutes, et une relaxation méditative au corps audio-guidée de même durée. L’ordre des interventions était contrebalancé. Avant et après chaque intervention, plusieurs mesures ont été prises : la variabilité de la fréquence cardiaque (HRV), la fréquence respiratoire, le score de stress perçu, le niveau de plaisir hédonique et les états de relaxation subjective selon l’échelle IERS-3-29. Les données ont été analysées par modèles linéaires mixtes (REML) intégrant les scores individuels d’anxiété, l’âge et la condition expérimentale.

Résultats. Les deux interventions ont induit une réduction significative du stress perçu, avec un effet plus prononcé chez les femmes présentant un niveau d’anxiété initialement élevé. Le massage s’est révélé plus efficace que la relaxation audio pour augmenter le plaisir subjectif et positive, deux indicateurs de bien-être émotionnel. Par ailleurs, une augmentation significative de la HRV a été observée après le massage, indiquant une activation vagale. Fait intéressant, l’activation vagale induite par le massage semblait indépendante de la réduction subjective du stress, ce qui suggère une action directe sur le système nerveux autonome. Ce contraste était particulièrement marqué comparé à la relaxation audio, dont l’effet vagal semblait dépendre de l’engagement cognitif de la participante.

Discussion et perspectives. Ces résultats confirment le rôle central du toucher comme outil de régulation physiologique, notamment dans le contexte du stress chronique et des troubles anxieux. Contrairement aux approches verbales ou cognitives, le toucher permet une entrée directe et non verbale dans la sphère corporelle, activant des mécanismes neurobiologiques profonds. Le fait que la régulation vagale soit induite même sans engagement mental témoigne de la puissance de cette voie d’accès.
Bien que ces résultats restent à être confirmer sur une plus grande population féminine, ils ouvrent la voie à une étude en neuroimagerie enfin de comprendre les mécanismes neurofonctionnels sous-tendant ces effets différenciés. Enfin, ces résultats alimentent la réflexion sur la place des approches corps-esprit dans la médecine de demain, et soutiennent l’intégration de ces interventions dans des parcours de soins préventifs personnalisés.